French flair (& food), menu du 1er juillet 2024
A la baguette
On le sait, dans les clichés associés à la France, le Français avec son béret et sa baguette arrive assez vite.
Eric Kayser, qu’on ne présente plus en France comme à l’international pour son réseau de boulangeries, a décidé de jouer à fond avec ces clichés qui font vendre dans le monde entier en lançant une nouvelle enseigne intitulée « Baguett » (ndla pour mes parents : sans « e » à la fin, ce n’est pas une faute de frappe 😉).
Déjà testée sous forme de concept store à La Samaritaine l’été dernier, cette marque, aux codes volontairement très playfull (univers rose bonbon, illustrations et gimmick de langage) destinée à séduire une clientèle plus jeune, franchit une nouvelle étape avec l’ouverture prochaine d’une première boutique permanente à Paris.
Au-delà d’une offre produit « classique » pour une boulangerie (avec simultanément des déclinaisons de baguette à l’image d’une boutique mono-produit et une offre de pains et viennoiseries traditionnels), il est intéressant de noter que la marque se positionne dès le départ avec une envergure lifestyle et un merchandising étoffé. Vous pourrez ainsi notamment y acheter une bougie « Chaud time » qui reproduit l’odeur du pain chaud, un béret rose que Barbie n’aurait pas renié, une éponge croissant totalement instagrammable et même une ligne « miett » dédiée aux enfants.
Une première boutique en France avant, très certainement un développement à l’international (notamment, sans trop de doute, en Asie) pour séduire tous les « Emily in Paris wannabes » !
Hot trend
D’un symbole français à une icône américaine, il n’y a qu’un pas ou plutôt une bouchée.
A l’heure où l’été est (enfin) là et que les festivals battent leur plein, nous allons parler aujourd’hui du hot-dog, ou plutôt de la façon dont le hot-dog est passé d’icône de la culture populaire américaine à exercice de style incontournable pour toutes les tendances de fond de consommation.
Timelapse du hot-dog
Avant de regarder les multiples déclinaisons actuelles, petite histoire rapide du hot-dog en 3 périodes-clés.
19ème siècle : introduction et accessibilité. Si les origines exactes du hot-dog (et de son nom !) restent floues, il est en revanche sûr qu’il est arrivé à New-York avec les migrants allemands. C’est alors un aliment simple, populaire et bon marché pour les travailleurs ou ceux qui souhaitent grignoter quelque chose en chemin
Première moitié du 20ème siècle : symbole de l’américanisation. Après les années folles et la seconde guerre mondiale, la culture américaine s’impose progressivement comme la référence culturelle mondiale. Le hot-dog déferle dans les habitudes culinaires comme un symbole de la culture mainstream
Seconde moitié du 20ème siècle : up and downs. Si les années 50-60 marquent l’âge d’or du fast-food et – avec lui – du hot-dog, les années 70 à 2000 sont beaucoup moins glorieuses pour lui. Avec la montée des préoccupations nutritionnelles et la nouvelle cuisine, le hot-dog perd de sa superbe. Il est, cette fois-ci associé au revers de la médaille de la culture américaine : malbouffe et archétype de l’Américain moyen
Mais, comme « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme », on assiste, ces derniers temps, à un retour en grâce du hot-dog sur la scène culinaire mondiale. Ce dernier, en adoptant les codes alimentaires actuels, a su faire oublier ses années de disette.
Tendance 1 : le hot-dog gourmet
On le sait, la désirabilité d’un produit passe souvent par la caution d’un prescripteur haut de gamme. Ainsi, de même que, généralement, les tendances mode sont créées dans les maisons de haute-couture et descendent ensuite progressivement dans la rue, les tendances food sont souvent créées par les chefs et se diffusent progressivement tout le long de l’échelle de la restauration.
A ce titre, il convient de citer Yannick Alleno qui – dès 2012 et l’ouverture de son premier établissement « Terroir Parisien » à la Mutualité - avait mis à la carte un hot-dog de tête de veau.
Outre-Atlantique, une autre figure a contribué à la montée en gamme du hot-dog : Will Guidara. Alors directeur de salle du restaurant 3 étoiles Michelin Eleven Madison Park, il avait, pour faire plaisir à un groupe de clients gourmets qui lors de leur séjour à New-York n’avaient pas encore goûté un hot-dog, réussi à convaincre le chef de leur servir un « hot-dog de rue » au milieu d’une ribambelle de plats ultra-travaillés et raffinés.
Depuis, le hot-dog s’est premiumisé à la fois par le sourcing des ingrédients (pain de boulanger, saucisses artisanales de porc, bœuf ou volaille, fromages AOP,…) et par ses condiments, qui, au-delà du classique ketchup industriel, rivalisent d’originalité et de raffinement (légumes en pickles, sauces cuisinées, herbes fraîches, ..).
Les exemples sont multiples et partout dans le monde mais on peut, entre autres, citer – en France – le Café Jules à Paris avec son « hot-dog » à la française, Fortune à Lyon avec son hot-dog de saucisse de Francfort fumée, sauce cheddar, poire, gingembre et pickles de piment vert, le Hot my Dog Café à Rennes avec une version garnie de crème de butternut et condimentée d’un ketchup à la framboise ou Pawns à Nantes avec son hot-dog garni d’une compotée d’oignons au muscadet et moutarde au miel. Aux Etats-Unis, le hot-dog passe de street à snob et affiche toutes les extravagances culinaires (et les prix qui vont avec). On peut ainsi mentionner le hot dog à 187$ du Pendry Chicago Hotel composé d’un pain aux graines de pavot, d’un boudin blanc « à la française », condimenté d’une moutarde à la truffe noire et d’un crumble de seigle et de cèpes et servi avec un old-fashioned à base de whisky de 12 ans d’âge.
Tendance 2 : le hot-dog veggie
Sans aucune surprise, une tendance incontournable pour le hot-dog est sa version veggie. La majorité des enseignes monoproduit « haut de gamme » propose une variante végétale à la fois comme exercice de style mais aussi par intérêt business (en effet, un restaurant qui n’a pas à sa carte une proposition veggie se coupe non seulement des végétariens mais aussi des groupes qui incluent statistiquement un probable végétarien).
La plupart du temps, l’alternative veggie est composée d’une saucisse végétale, soit à base de légumineuses, soit de champignons ou de soja.
Dans les propositions nouvelles et différenciantes, on peut mentionner les Carrot dogs. Une carotte (qui a déjà naturellement l’avantage d’avoir la même forme et la même couleur qu’une knack) mais avec « toute la saveur fumée satisfaisante d'un hotdog classique ».
Autre preuve, de l’importance croissante du hot-dog dans sa version veggie, l’annonce par Ikea (qui en plus d’être un géant de l’ameublement est aussi un poids lourd de la restauration avec ses restaurants), de la mise à la carte de manière permanente d’un hot-dog veggie (composé d’une saucisse à base de lentilles corail et de quinoa) pour 1€.
Tendance 3 : le hot-dog métissé
La « fusion food » s’empare aussi du hot-dog, confirmant ainsi son passage d’icône de la culture américaine à aliment universel pour toutes les cultures culinaires.
Dans les réinterprétations les plus connues, et diffusées à grande échelle, on peut mentionner les k-corn dogs, à savoir la version coréenne des hot-dogs. Soutenu par l’engouement des jeunes générations pour la k-pop et la k-food, le corn dog est même progressivement en train de devenir le plat emblématique de la culture culinaire coréenne à l’international devant le bibimbap.
Toujours en Orient, on peut aussi mentionner le hot-dog banh-mi et le hot-dog au kimchi qui proposent, chacun à sa façon, une fusion entre cultures américaine et asiatiques.
Tout récemment à Paris, façon levantine cette fois-ci, le chef étoilé israélien Assaf Granit propose, dans sa nouvelle cave à manger Shana, un hot-dog merguez, aïoli, shakshuka vert.
Plus proche géographiquement de ses racines américaines, le hot tortilla dog (où le pain, comme vous pouvez l’imaginer, est remplacé par une tortilla) incarne la fusion du hot-dog et de la tortilla mexicaine. Dans la même veine de fusion food latino-américaine, la Cheffe d’origine mexicaine Bricia Lopez, installée à Los Angeles, propose un hot-dog cuit avec la technique de l’asado (entouré de fines tranches de bacon et cuit lentement au feu de bois) et garni de piments japaleno.
Gourmet, veggie ou métissé, le hot-dog se décline donc à toutes les sauces. Un nouveau terme a même été créé pour traduire cette tendance à l’hyper personnalisation du hot-dog : le loadded-dog qui image bien ce principe d’accumulation des sauces et ses toppings pour faire un hot-dog à son goût.
Tendance 4 : le hot-dog lifestyle
Si jusque-là vous avez à peu près suivi, je pense que vous n’êtes malgré tout pas prêt pour ce qui va suivre. En effet, le hot-dog, au-delà d’un simple aliment, est devenu ces dernières années un véritable phénomène lifestyle et un marqueur statutaire revendiqué. Il permet d’afficher son appartenance à une certaine culture citadine, décontractée et branchée et donc … hype.
Désormais, non seulement le hot-dog se mange, mais il se porte et il décore les intérieurs pour des prix loin de ceux originels d’un en-cas populaire.
Au rayon mode, on peut notamment citer le sac hot-dog Moschino (revendu actuellement autour de 500€ sur Vestiaire Collective), le porte-monnaie Kate Spade (sold out) ou la pochette entièrement sertie de cristaux et en forme de hot-dog proposée pour la modique somme de 5 995$.
Au rayon aménagement intérieur, la très tendance Maison Deux propose quant à elle un tapis hot-dog pour faire de sa maison un « statement » (sic). Pour aller encore plus loin (si l’envie vous en dit !), l’enseigne de design italienne Seletti a même à son catalogue un canapé hot-dog entièrement fabriqué en Italie.
Le hot-dog, en ayant su s’adapter aux tendances actuelles, en passant de populaire à statuaire, s’affirme comme une figure de style incontournable actuellement.
Et quoi de mieux pour fournir qu’un proverbe allemand tout à faire dans le thème ? “Alles hat ein Ende, nur die Wurst hat zwei.” (tout a une fin, sauf la saucisse qui en a deux ) !
Lu, vu, entendu
Dans un article paru dans le New-York Times fin mai « The French don’t snack. They apero. », la journaliste décrypte un rituel (voire un art ?) très français : l’apéritif.
Elle différencie tout d’abord le snacking (très américain et à n’importe quel moment de la journée) de l’apéritif (français et très majoritairement en fin d’après-midi avant le diner mais aussi parfois avant le déjeuner).
Venant du latin « aperire » (ouvrir) la journaliste donne aux Américains quelques clés pour faire un apéritif à la française digne de ce nom et pour choisir des éléments qui viennent effectivement bien ouvrir l’appétit et non pas plomber définitivement le repas.
Des boissons à « teneur modérée » en alcool : vin blanc sec ou pétillant, bière ou apéritif simple type kir ou pastis
De petites bouchées salées à picorer qui sont – normalement – là uniquement pour titiller les papilles et ne pas remplir l’estomac : olives, cacahuètes ou amandes assaisonnées, légumes à dipper dans diverses sauces ou petites tartinades
Des convives avec qui déguster et grignoter. Et c’est là le plus important car, on le sait, le plaisir de l’apéritif n’est pas uniquement gustatif, il est surtout social.
Avec cette ouverture apéritive, French flair (& food) fait une pause pour les congés d’été. Je vous souhaite des apéritifs nombreux et joyeux et un bel été avant de se retrouver à la rentrée !