French flair (& food), menu du 29 mai 2023
Tout nouveau tout chaud (cacao)
Madame Cacao, 10 rue du Cherche Midi (Paris 6ème)
On connaissait Christelle Brua comme pâtissière 3* au Pré Catelan puis comme première Chef Pâtissier de l’Elysée, on la découvre maintenant après quelques temps d’absence chocolatière ! Une nouvelle étape dans son parcours qu’elle a voulu comme un retour à des émotions simples et des goûts d’enfance après des années de techniques de haut-vol et de desserts époustouflants. Du chocolat sous toutes ses formes (tablettes, barres, bonbons, friandises) et à terme quelques pâtisseries avec deux éléments déjà signatures : la tablette au sucre pétillant en souvenir de sa célèbre « Pomme en sucre soufflé, crème glacée caramel, cidre et sucre pétillant » du Pré Catelan et le lapin Lucien avec ses petites billes de maïs soufflé en clin d’œil à son fils.
La boutique est juste à côté de la boutique originelle Poilâne, de quoi se faire un quatre heures pain et chocolat de haut vol !
Plat de résistance
Miscellanées de mycélium
Depuis quelques mois, le champignon a la cote. Et pas que dans une bonne poêlée avec de l’ail et du persil. En effet, le champignon sort de l’ombre des forêts et disperse désormais ses spores dans tous les domaines de notre vie à tel point que les anglo-saxons – avec leur sens habituel de la mesure – parlent de « Mycelium movement ».
Cette tendance, que beaucoup rattachent à la quête très contemporaine de retour aux racines et d’un mode de vie plus durable, s’exprime d’abord de manière très terre à terre (c’est le cas de le dire!) par une surreprésentation visuelle aussi bien dans la mode que dans la décoration d’intérieur. Plutôt cantonné initialement au domaine de la fantasie, le champignon s’est affiché fièrement dans les dernières collections de créateurs tendance tels que Rodarte (avec sa robe Mushroom printed) ou dans la collection automne/hiver 2022 d’Alexander Mc Queen.
En parallèle en 2022, le New-York Times attribuait au champignon le titre d’ « Ingrédient de l’année »
Le phénomène s’est dans la foulée propagé à nos intérieurs et Pinterest annonce qu’en 2023 la « mush-room » ( !!) sera l’une des plus grosses tendances de la décoration.
Bref, vous l’aurez compris, en 2023 ce n’est plus une Rolex qu’il faut avoir au poignet mais bien un champignon.
Si le champignon va devenir à ce point présent dans nos vies, ce n’est pas tant pour sa forme – qui représente la partie la plus éphémère de ce mouvement – que pour le fond et ses multiples ressources intrinsèques.
Partie 1 : le champignon en tant que matériau durable
Qu’est ce qui peut à la fois offrir une alternative végétale au cuir, être utilisé en isolant acoustique, remplacer le plastique dans les emballages ou encore servir de matériau pour un fauteuil léger et robuste ? Le mycélium. Les nombreuses recherches des dernières années ont en effet permis de mettre à jour des propriétés qui font du mycélium un matériau répondant à toutes les problématiques de durabilité : biodégradable, neutre en carbone, léger mais solide voire même autoréparable (découverte toute récente de chercheurs en biotechnologie de l'Université de Newcastle et de l'Université de Northumbria, au Royaume-Uni).
Au fur et à mesure de ces découvertes, le mycélium quitte le statut de moisissure pour acquérir le statut de matériau noble. Stella Mc Cartney, fer de lance d’une mode plus responsable voire vegan, a ainsi proposé un sac à base de cuir de champignon. Toujours dans la mode, le mycélium de champignon peut servir à l’ennoblissement de textiles en créant des effets de plissage ou de tie and dye via un procédé écologique (visible dans l’exposition Design Durable Désirable présentée à la French Design Galerie à Paris jusqu’au 13 juillet). Dans l’ameublement, Ligne Roset a annoncé travailler avec l’entreprise de la biotech MycoWorks, pour proposer des produits à base de cuir de mycélium. Premiers éléments attendus pour 2023 : des coussins en édition limitée baptisés « Ténéo ». Par ailleurs, grâce à la densité de son réseau, le mycelium – quand il « pousse » dans des moules préformés– peut créer des objets à la fois totalement bioresponsables et résistants. Le musée du design danois à Copenhague, dans son exposition actuelle « Future is present » présente notamment une chaise à base de mycélium de champignon et de fibres de chanvre. Enfin, comme le mentionnait la précédente newsletter, le mycélium peut aussi servir de packaging pour proposer une alternative neutre en carbone au plastique.
Comme toute tendance, celle-ci commence par les produits et les marques les plus premium et va progressivement se diffuser aux marques de grande consommation à la fois par un effet d’offre et de demande.
Partie 2 : le champignon en tant qu’ingrédient miracle
Si le potentiel du champignon pour l’ameublement et le textile est une découverte plutôt récente, ses bénéfices santé sont reconnus depuis des milliers d’année dans la médecine chinoise. Shiitaké, Matsutaké, Hydne hérisson ou encore Reishi font en effet partie des ingrédients médicinaux de base en Extrême Orient.
Dépoussiérés du caractère parfois obscur que peuvent avoir les médecines traditionnelles, ils reviennent en force dans notre alimentation et sont considérés à la fois comme un des éléments centraux d’une alimentation plus durable et comme un acteur clé de la foodtech. Le cabinet de recherches et d’analyses britannique Technavio a ainsi estimé que les ventes de champignon allaient progresser de près de 19 milliards de dollars d’ici à 2025.
Sous format solide et grâce à sa bonne teneur en protéines, le champignon constitue une alternative végétale à la viande. Le « portobello » était déjà régulièrement utilisé à l’état brut comme steak végétal pour sa mâche et sa jutosité. Certaines entreprises de la « mushroom tech » comme Eat Meati se servent désormais des racines de champignon pour proposer diverses variantes veggie aux produits carnés les plus courants tels que des steaks, nuggets ou blancs de poulet. D’autres utilisent les propriétés énergisantes de certains champignons pour en faire des snacks énergétiques.
Sous format liquide, les possibilités pour bénéficier des multiples vertus des champignons sont nombreuses. En version soft drink, les très trendy boissons adaptogènes se déclinent en saveur café ou chocolat (la marque Four Sigmatic par exemple) voire même en format de capsules compatibles avec des Nespresso. Certaines marques utilisent aussi les propriétés énergisantes du Hydne Herisson ou du cordiceps pour proposer des energy drinks beaucoup plus naturelles que le fameux red bull. Enfin, au dernier CES, la société MycoTechnology a présenté un lait aux champignons à base de protéines de shiitakés. Une nouvelle proposition qui viendra prochainement enrichir la catégorie des laits végétaux en constante progression ces dernières années.
En version moins soft, on constate aussi un essor des cocktails infusés aux champignons. Les mixologues valorisent notamment le caractère « umami » des champignons qui amènent ainsi un nouveau relief à leur composition. Un des tout premiers à assumer pleinement la composition à base de champignon a été le « Truffle pig », proposé dans un restaurant farm-to-table de Dallas. Il associe une base de tequila, un jus de citron et un miel infusé de chanterelles et de maitake avec en décoration finale un immense chapeau de Shiitaké. Depuis de plus en plus de bars en proposent à Los Angeles, Las Vegas ou même Colombus. Dans la même veine, on trouve aussi de nombreuses bières infusées aux champignons.
Bref, vous l’aurez compris, dans les années à venir, le champignon va infuser par tous les (s)pores de notre peau.
Partie 3 : le champignon dans l’hôtellerie restauration
Bien évidemment, le champignon a toujours été présent dans la restauration et plus particulièrement dans la gastronomie où ses espèces les plus nobles (truffe, morille, cèpe) font quasiment partie des mandatories pour un restaurant 2 ou 3 étoiles. On ne peut d’ailleurs pas parler de champignon sans parler de Régis Marcon, chef 3* qui en a fait sa signature. Au-delà des différentes propositions salées, il a été le premier chef à proposer le champignon dans des accords sucrés tels que morille et caramel ou chocolat et praliné de cèpes.
Par contre, un élément nouveau (et révélateur de l’importance progressive que prend le champignon dans nos sociétés) est l’arrivée de concepts hôteliers premium autour de ce produit. Au Luxembourg, un écolodge durable valorise ses maisons champignons (MushRooms) comme un endroit clé de ressourcement pour les amoureux de la nature. Par ailleurs, à East-Village (lieu ô combien lanceur de tendances à New-York), le Standard Hotel accueille une ferme urbaine de champignons et en fait un élément central de sa convivialité : la ferme urbaine est entièrement visible depuis le restaurant (et fait donc partie intégrante de l’expérience en salle), des récoltes ont lieu de manière hebdomadaire en présence des clients (qui dégusteront ensuite les champignons au restaurant de l’hôtel notamment dans un menu qui lui est entièrement dédié), des cycles de conférence et de rencontres sont organisés autour de la thématique dans toutes ses dimensions (santé, alimentaire, psychédélique, design ou fashion). Nul doute que ce type de concept poussera comme champignons après la pluie dans les quartiers branchés de différentes métropoles.
Comme le résume Anne-Marie Roerink, auteur de plusieurs analyses approfondies de nos marchés actuels tels que « The power of Meat » :
« Il y a 3 leviers de croissance pour un produit, une marque ou une catégorie : plus de personnes peuvent l’acheter, les mêmes personnes peuvent l’acheter plus souvent ou certaines personnes peuvent payer un peu plus cher pour l’expérimenter de diverses façons. Plus un produit, une marque ou une catégorie répond à ces 3 critères, plus la tendance va être forte. ».
Le champignon, avec toutes les variantes mentionnées précédemment, coche parfaitement toutes ces cases.
D’abord féérique puis psychédélique, il va désormais devenir emblématique d’une nouvelle façon de consommer.
Save the date (and the grape)
Les 17 et 18 juin prochains aura lieu l’inauguration de la Cité des Climats et des vins de Bourgogne.
Les Climats de Bourgogne, classés au patrimoine de l’Unesco depuis le 4 juillet 2015, sont caractéristiques de la culture bourguignonne. Ils désignent de petites parcelles de vigne réparties sur la côte de Nuits et la côte de Beaune avec des caractéristiques uniques (géologie, exposition, cépage) qui confèrent aux vins de Bourgogne leur renommée mondiale.
Cette Cité des Climats aura une triple localisation pour faire découvrir au travers d’un parcours immersif et de multiples ateliers tout le spectre de la Bourgogne viticole : une implantation principale à Beaune et deux antennes à Chablis et Mâcon (vins du nord de la Bourgogne/vins du sud de la Bourgogne).
La conclusion revient bien évidemment à la Confrérie des Chevaliers du Tastevin : « Jamais en vain, toujours en vin » !