French flair (& food), menu du 28 octobre 2024
Crillon d’or
La concurrence entre palaces fait rage à Paris, notamment pour séduire une cible plus jeune et plus locale, comme nous l’avions déjà évoqué il y a quelque temps maintenant.
Dans cette course à la différenciation, il faut reconnaître que le Crillon sort du lot par son dynamisme, avec trois nouvelles initiatives en moins d’un an pour coller à l’air du temps et proposer à ses clients, actuels ou futurs, des expériences inédites, très modernes dans leurs thématiques et, toujours, très haut de gamme.
Attente client n° 1 : le multisensoriel. Réponse du Crillon : mise en place de dîners expérientiels avec 5 rendez-vous de mai à novembre 2024, chacun dédié à un sens (la vue, l’odorat, etc.), et commenté par un expert de la thématique (le nez de chez Guerlain pour l’odorat ou un géologue pour le toucher notamment)
Attente client n° 2 : le sans alcool. Réponse du Crillon : proposition dans son restaurant « L’Ecrin » d’une offre de menus pensés pour un pairing avec des boissons sans alcool. Des thés sélectionnés pour leur capacité à dialoguer avec des notes iodées, un café pour relever les notes carnées et deux « élixirs » sans alcool conçus par le mixologue Matthias Giroux
Attente client n° 3 : le sucre autrement. Réponse du Crillon : lancement en octobre des « Rencontres sucrées » où les participants pourront, en petit comité, échanger avec le Chef-Pâtissier de la maison, Matthieu Carlin, et un expert référent de la thématique de la rencontre (Roï Hendel, créateur des Epices Shira ou Hippolyte Courty, fondateur de l’Arbre à Café, entre autres)
Bref, les tendances se lisent dans les lustres en cristal du Crillon !
Holistique : le « hol-inclusive » réinventé
Si, après la lecture de la dernière newsletter, vous n’êtes pas (encore) tout à fait prêt à partir 5 jours en retraite pour faire des câlins aux arbres, vous ne seriez, en revanche, pas contre une petite dose supplémentaire de paix intérieure et de bien-être lors d’un prochain séjour à l’hôtel ? Sachez que, pour vous plaire (et faire du business additionnel) les acteurs du secteur sont en train de se transformer profondément. Ce changement structurel est d’ailleurs vraiment global car il touche à la fois tous les pays et toutes les catégories d’hôtels (pas uniquement les 4 et 5* même si, bien évidemment, le curseur est plus poussé pour ces établissements). Pour essayer de synthétiser l’effervescence dans le domaine, on peut considérer que la dimension holistique impacte majoritairement trois piliers de l’industrie hospitalière
L’offre de services
L’offre de restauration
Le design des établissements et des chambres
1. L’offre de services
La concrétisation la plus évidente de l’adaptation du secteur de l’hospitalité à cette nouvelle attente holistique est bien évidemment l’offre de spa. En quelque sorte, un soin et ça repart. Si les spas étaient, il y a quelques années, l’apanage des 5 étoiles et des palaces, de plus en plus d’hôtels se mettent à proposer ce service (ou, a minima, un sauna ou un hammam). Un point intéressant d’ailleurs à noter est l’évolution géographique des spas. Autrefois souvent « relégué » au sous-sol de l’établissement,
“ Le spa transitionne vers des localisations plus prestigieuses ou stratégiques” comme l’explique Anne-Louise Pothier, Directrice Internationale Hospitality & Spa de Dior Beauty.
La différenciation ne se fait donc plus tant sur le fait de proposer le service que sur le prestige de la marque en charge du spa pour chaque hôtel et sur le degré de personnalisation des soins. Rien qu’à Paris, le name dropping fait rage : Dior donc au Cheval Blanc, Biologique Recherche pour le Ritz et le Peninsula, La Prairie au Bristol, La Mer pour la Maison Proust ou Guerlain à l’hôtel Saint James notamment.
Au-delà du spa, chaque groupe hôtelier essaie aussi de proposer de nouveaux services pour répondre à sa propre typologie de clientèle. En effet, Amanda Al-Masri, Vice-Présidente bien-être chez Hilton (j’aurais aussi pu faire aussi un paragraphe entier sur tous les nouveaux métiers créés !), le détaille clairement : « tous les clients ne s’intéressent pas de la même manière au bien-être » car cette tendance multidimensionnelle résonne pour chacun différemment.
Ainsi, au-delà de différentes chartes « statement » des groupes (Accor, Hilton ou Mariott), chaque marque essaie de créer des services ou protocoles « signature » pour attirer et fidéliser sa clientèle-cible.
Voici un petit inventaire à la Prévert de différentes initiatives pour se rendre compte de la multiplicité des offres proposées :
Les hôtels Raffles se basent sur le Feng Shui avec un triptyque décoration de la chambre + protocole de soin + menus conçus pour optimiser le sommeil et combattre le décalage horaire
Fairmont a une approche plus « dynamique » de la dimension holistique en proposant plusieurs activités wellness, du cardio à la méditation
Les hôtels Pullman cherchent quant à eux à accompagner la « puissance » de leurs clients via des séances « Power Fitness » qui optimisent la condition physique entre travail et détente
L'hôtel parisien Chouchou propose, lui, une expérience holistique aquatique avec des bains privatifs et des programmes de sophrologie aquatique
La chaine hôtelière Hilton a conclu un partenariat avec la marque de vélos connectés « Peloton » pour équiper ses hôtels aux Etats-Unis et propose certaines chambres « Salt » pour réaliser des séances d’halothérapie avec du sel de l’Himalaya (la halothérapie repose, pour essayer de faire simple, sur le principe de séjourner dans une grotte de sel pour profiter de tous ses bienfaits. Au choix, pour moi, ça sera plutôt dans une grotte pleine de homards !)
Le groupe Aman vient de nommer Novak Djokovic (oui oui) comme conseiller bien-être pour améliorer ses expériences santé, bien-être et sport
Les établissements Mandarin Oriental, enfin, ont fait de leur côté noué un partenariat avec Joint Dynamics pour « améliorer la qualité de mouvement [de leurs clients] par une approche croisée de bien-être et de fitness »
Un peu en dehors de l’hôtellerie, mais tout aussi révélateur de cette tendance, les Galeries Lafayette Haussmann ont désormais un espace entier consacré à cette envie d’équilibre global : la Wellness Galerie. Pas moins de 3000m2 dédiés à l’alimentation, au sommeil, à la relaxation et au sport. Au prix du mètre carré dans le quartier, on comprend vite que le bien-être des uns fait les affaires des autres.
2. L’offre de restauration
De manière assez évidente, on peut se douter qu’un hôtel qui promeut le bien-être, l’harmonie ou même la relaxation dynamique, va poursuivre l’expérience sur la partie restauration. En effet, un client qui vient de payer 200€ pour un massage consacré à la détente des méridiens ou pour un cours de tai-shi-pilates, n’a pas forcément envie de tout ruiner aussitôt en prenant un burger frites plein de sucres rapides et de graisses saturées.
On voit donc une nouvelle offre de restauration apparaître progressivement, plus végétalisée, plus fraîche et plus saine. Nouvelle offre qui, si elle a le mérite de répondre aux attentes des clients, ouvre néanmoins pour le secteur d’autres contraintes en termes de rentabilité et de sourcing. L’approvisionnement bio ou local (et sa mise en valeur !) est quasiment devenu un mandatory et la végétalisation du menu est perçue comme un élément créateur de valeur. A ce titre, on peut notamment citer l’hôtel Hoy à Paris, qui incarne totalement ce positionnement, résumé ainsi dans sa baseline « Nous cultivons le pouvoir du moment présent, l’art du bien vivre et du bien manger ». L’hôtel propose en effet des cours de yoga mais aussi « un restaurant avec une approche holistique, proposant une cuisine végétale inspirée par nos racines Latino-Américaines. Nous sommes fiers de proposer des ingrédients honnêtes, conscients et local. (sic) ».
Si la redéfinition de la carte constitue le niveau 1 de la dimension holistique pour la restauration, celle-ci peut prendre de multiples formes pour reconnecter les clients – non pas à leur téléphone- mais à la nature et à l’environnement. A ce titre, la prise de conscience environnementale et le « zero waste » dans l’offre de restauration sont de plus travaillés et valorisés ; et les ateliers pour accompagner les hôtes dans cette nouvelle vision de l’alimentation fleurissent. Rencontres avec les producteurs, cours de cuisine, ateliers de mixologie zéro déchet, etc. sont autant de modules « expérienciels » que les clients peuvent ajouter à leur séjour.
3. Le design intérieur
Avez-vous déjà entendu le terme « biophilic design » ? Si non, sachez qu’il sera très certainement un des prochains critères de recherche sur booking.com.
Pour faire simple, l’objectif du design biophilique est de renforcer nos connexions avec la nature en introduisant des éléments naturels dans nos espaces intérieurs. Bien entendu en limitant l’impact environnemental de l’hôtel, mais aussi en intégrant des plantes ou des murs végétaux, en choisissant des matériaux naturels bruts, en favorisant la lumière naturelle ou en ramenant des éléments aquatiques par exemple. Pourquoi ? Car loin d’être un nouveau délire de designer, le design biophilique contribue à la réduction du stress et améliore le bien-être et la productivité, non seulement des clients, mais aussi des salariés.
On comprend donc vite comment le design biophilique devient un mandatory dans les cahiers des charges des hôtels et contribue, structurellement, à la construction d’une expérience holistique durable.
La chaîne d’hôtel « 1 Hotels », pionnière sur le sujet, a construit sa différenciation sur ce principe de design intérieur. Ainsi, son établissement new-yorkais fait la part belle au bois et à la pierre et offre de grandes baies vitrées avec vue sur Central Park.
Le Park Royal Collection à Singapour est quant à lui un chef d’œuvre du design biophilique. Toutes ses technologies et pratiques ont été pensées pour être ecofriendly et son architecture, composée de multiples jardins-terrasses et cascades, s’intègre parfaitement dans le parc où il a été construit.
Plus proche, en Europe, la chaine d’hôtels Hoxton, implantée au cœur des grandes villes, réussit à ramener la nature à l’intérieur de ses établissements grâce à des plantes et des matériaux bruts, mais aussi grâce à des couleurs douces inspirées de la nature.
A Paris enfin, pensée par Philippe Stark, la Villa M ramène la nature en ville avec une façade végétalisée qui donne l’impression d’une forêt verticale en plein cœur du 15ème, la présence de micro-jardins suspendus à l’intérieur, la lumière naturelle (bon, on est à Paris, pas à Los Angeles non plus !) et l’utilisation de couleurs douces et naturelles.
En deux newsletters et quelques exemples, je pense que vous aurez compris que l’hospitalité et le tourisme seront holistiques ou ne seront pas.
Toutefois, si vous êtes encore un peu dubitatif, un article paru dans The Guardian pourrait finir de vous convaincre : « How saunas are challenging UK pubs at the place to meet. » (i.e. : comment les saunas sont en train de concurrencer les pubs traditionnels comme lieux de socialisation).
God save the « Chi » !
Trendy
L’institut Brandwatch vient de sortir son étude 2024 sur les tendances Food & Beverages, basée sur l’analyse des discussions en ligne.
Si on retrouve, sans surprise, les tendances de fond déjà évoquées ici (les champignons, la cuisine fusion, les nouvelles boissons, etc. ), voici quelques informations plus anecdotiques mais qui, j’en suis sûre, feront des sujets de discussion parfaits le matin autour de la machine à café.
L’émoji « food » la plus utilisée est celle de la tasse à café. Les gens s’en servent notamment pour souhaiter une bonne journée à leur communauté
Les baby-boomers sont ceux qui utilisent le plus l’émoji « gâteau d’anniversaire », les millenials l’émoji « pizza », là où la gen Z préfère l’émoji « burger »
Le top 5 des lieux mentionnés avec le hashtag #travel sont, dans l’ordre, l’Italie, la Thaïlande, Paris, Bali et Taïwan
Les bowls (poke, smoothie, etc..) sont la tendance alimentaire n°1 (une opportunité pour les marques de vaisselle ?)
Enfin, signe du contexte économique actuel, les discussions en ligne sur les restaurants et les plats à emporter sont en baisse (respectivement -9% et -7% en un an) ; là où les mentions relatives au fait-maison sont en hausse (+12% en un an).