French flair & food, menu du 15 décembre 2025
Un parcours semé d’(em)bûches
Noël. Quatre lettres, deux jours, et une flopée d’émotions qui s’y accrochent.
Enfant, c’est la magie qui domine (et heureusement !). On fait une liste au Père Noël qui tient difficilement en trois volumes, on se réjouit de veiller tard, d’engloutir des papillotes et de retrouver toute la famille.
Adulte, disons que Noël devient… plus ambivalent. Un peu de magie (heureusement encore !), mais surtout une bonne dose de logistique et de diplomatie : chez qui va-t-on ? Qui offre des cadeaux à qui ? Quel menu peut convenir à tout le monde ? Quels sujets sont “autorisés” à table ?
Alors, pour s’échauffer avant ce véritable marathon festif, je vous propose un petit
110 m bûches : un tour d’horizon des bûches qui résument l’année 2025.
Car, disons-le clairement, si la bûche de Noël tient modestement son nom d’une grosse bûche de bois qu’on faisait brûler le soir de Noël, elle est désormais ce que certains appellent une « perishable masterpiece » (c’est cadeau, ne me remerciez pas, vous penserez à moi quand vous le recaserez le soir du 24). En effet, pour toutes les marques (pâtissière, hospitalière, couture ou autre) ce n’est plus seulement un gâteau mais l’affirmation d’un style, d’un storytelling ou de convictions qui, d’une façon ou d’une autre, révèlent les tendances phares de notre époque.
Tendance Umami
On en a parlé à plusieurs reprises, l’influence des pays asiatiques sur nos cultures culinaires est de plus en plus forte.
L’umami, saveur que l’on ne présente plus, est recherchée non seulement dans les plats salés mais aussi dans les créations sucrées pour la profondeur de goût qu’il amène (en faisant un TRES gros raccourci, on peut dire que l’umami est d’une certaine façon l’ancêtre du swicy car tous deux répondent à une demande croissante d’intensité sensorielle et de longueur en bouche).
A ce titre, on peut citer la bûche « Kintsugi » de la pâtisserie Ginko. Au-delà du nom très poétique qui lui aurait aussi permis de concourir dans la catégorie upcycling, sa composition autour du chocolat, de la noisette et d’un caramel de miso amène une intensité et une profondeur de goût totalement umami.
D’un point de vue visuel, on peut aussi citer la bûche « Santa Parmigiano » du groupe Big Mamma qui prend la forme d’une meule de parmesan (ô combien umami) mais avec en revanche une composition gustative très classique.
Tendance ambulatoire
Si le business lunch, très statique et statutaire, représentait une certaine forme de hype dans le monde des affaires des années 80, maintenant il faut être « on the go », mobile et flexible pour être tendance. Time is always money : on cherche aujourd’hui à ne pas perdre de temps quand autrefois on en investissait auprès des gens.
La bûche Café Kitsuné, imaginée par Yann Brys, s’inscrit totalement dans cette tendance puisqu’elle reprend les codes des gobelets emblématiques des boissons à emporter. Cela confirme que le gobelet à emporter devient vraiment un objet du quotidien comme nous l’avions déjà mentionné ici avec une version déclinée par Bernardaud en porcelaine.
Tendance holistique
Véritable raz de marée de l’hospitalité dans son ensemble (nous en avions notamment parlé ici et ici), la tendance holistique s’inscrit bien évidemment dans les collections de Noël, avec la volonté d’une création qui concilie harmonie de goûts, harmonie avec un écosystème local et justesse de sourcing.
Les Sources de Caudalie, pionnier de l’hospitalité holistique, se positionnent bien entendu en fer de lance aussi pour leur création pâtissière de fin d’année avec la bûche « La Grand’ Vigne » : un crémeux au yuzu, fruit directement cultivé en bordure des vignes du Château, attention au sourcing du chocolat, importance de la biodiversité et du terroir, équilibre des saveurs et juste dosage du sucre (parce que bon, le but de la bûche de Noël ce n’est pas que se donner bonne conscience, c’est d’abord de la manger !).
Toujours dans cette dynamique, j’aurais aussi pu vous proposer la bûche d’eutonie : très holistique mais nettement moins gustative !
Tendance haute couture
On l’a déjà évoqué en long, en large (quoi que malheureusement encore pas trop dans la mode) et en travers, l’hospitalité est devenue l’un des plus gros leviers de business pour les marques de mode. Dans cette approche lifestyle globale, certaines marques jouent franchement le jeu, pas simplement en apposant leur logo sur la mousse d’un latte, mais en s’inspirant vraiment des archives et du style de la maison pour une réinterprétation gustative.
Yannick Alléno, qui reprend cette année les rênes (de Noël 😉) de la restauration pour Dior, a réussi l’exercice haut la main avec une bûche inspirée des lignes d’une robe dessinée par Christian Dior lui-même (la robe Francis Poulenc) et réinterprétée pour le festival de Cannes de cette année. Le résultat ? Une bûche quasiment textile dans la finesse de son plissé.
Tendance newstalgia
Pour les amateurs du newstalgia, qui aiment être surpris tout en se raccrochant à des valeurs sûres, la bûche du Chambard est faite pour eux. « L’âme du foyer » imaginée par le chef pâtissier Jordan Gasco avec le chef Olivier Nasti, reprend le visuel rassurant d’une vraie bûche posée sur un panier à bûches mais avec des saveurs pleines de modernité : praliné au pain de campagne, citron vert ou mousse infusée aux cosses de châtaigne.
Enfin, hasard du calendrier (ou conséquence du temps que les chefs passent à observer les créations de leurs pairs sur les réseaux sociaux) , on note cette année deux thématiques largement adoptées dans les créations pâtissières :
L’architecture : avec la réplique format entremets de bâtiments iconiques voire de l’établissement lui-même (on n’est jamais mieux servi que par soi-même !) : la Maison du Chocolat avec une réplique de la coupole de l’Opéra Garnier, l’Hôtel du Crillon avec son mini-me, de même pour le Relais Bernard Loiseau, Jeffrey Cagnes avec la Tour de Pise, Barelle à Toulouse avec la reproduction du Capitole,l’ Intercontinental de Bordeaux avec la cabane tchanquée locale, ou celui de Lyon avec la reproduction de sa coupole
Le sucre d’orge : avec notamment le Ritz et Claire Heitzler (qui l’ont tous les deux intitulés « Sucre d’orge ») ou le Printemps avec son Candy Cake imaginé par Bryan Esposito
Ça y est, maintenant que vous êtes bien échauffés, vous êtes prêts pour vous lancer dans le marathon des fêtes de fin d’année ! Je vous souhaite des repas savoureux, des moments chaleureux et de trinquer avec joie à la nouvelle année quand vous franchirez la ligne d’arrivée !


